MALBEC - Jean luc Molet Voyage en Argentine

MALBEC - Jean luc Molet  Voyage en Argentine

GARDE

 Garde

Garde

Un garde désigne de manière générique une personne ayant une activité de surveillance et de protection d'un lieu, de personnes, de matériel ou de valeurs. Les vins de gardes sont des vins faciles à boire, presque aqueux, afin d'en boire beaucoup et remonter ainsi le moral des troupes. Ces vins ont aussi la particularité d'être très acides et ceux qui peuvent en boire des litres sans risquer un ulcère à l'estomac sont des hommes, des vrais.

C'était le clin d'oeil nécessaire à Francois, garde organiste au service de la nature.

Les qualités gustatives d'un vin de garde

Il n'existe pas de règles absolues pour identifier un vin de garde. C'est en réalité une multitude d'indices qui vont conduire le dégustateur à juger le potentiel de garde d'un vin. L'équilibre est le premier critère et le plus important pour déterminer l'aptitude au vieillissement. Il représente un état harmonieux entre les différents éléments du vin. L'alcool, le sucre, l'acidité et la matière y sont réunis dans un accord parfait dans lequel aucun des constituants ne domine par rapport à l'autre. Un vin équilibré sera non seulement capable de résister au temps, mais aussi de se bonifier en augmentant sa complexité aromatique.

L'acidité, justement, est un élément fondamental pour la garde. Citer l'acidité ne signifie pas que le vin est imbuvable dans sa jeunesse : elle doit être contrebalancée par une matière soyeuse et du fruit. L'acidité apportera alors la vivacité nécessaire à la bonne tenue du vin. Un vin de garde, blanc ou rouge, n'est donc pas nécessairement mauvais dans ces premières années. Il peut, bien au contraire, se révéler parfaitement buvable à toutes les étapes de son évolution.

Enfin, la longueur en bouche est souvent un indice qualitatif majeur. Il serait en fait plus juste de parler de la qualité de la longueur que de la durée de la perception aromatique. Même si tous les vins caractérisés par une longueur en bouche (en raison des arômes de fruits notamment) ne sont pas nécessairement candidats à la garde, la quasi totalité des vins de garde présente cette caractéristique gustative.

Elevage en fût

Pour un vin rouge, on veillera à juger la qualité des tanins et celle du fruit. Des tanins durs et asséchants ne se fonderont jamais dans la structure d'un vin, quelque soit le temps de conservation. Au contraire, on pourra constater un retour du fruit après une phase parfois austère. Ces arômes sont alors plus complexes et d'une plus grande finesse. Pour terminer, notons qu'un vin de garde ne doit pas nécessairement être passé en fût de bois neuf pour défier le temps. Un simple passage dans des fûts "usés" garantira une oxydation en douceur sans enrichir le vin en tanins exogènes.

Essayer son vin

Un indice parfois mentionné pour juger l'aptitude au vieillissement d'un vin est de tester son évolution après plusieurs jours d'ouverture. Un vin capable de se maintenir - voire de se bonifier - après un à trois jours d'aération aura plus de chance de résister à l'usure du temps qu'un vin qui n'a plus rien à dire au bout de deux heures. Si la résistance à l'oxydation est effectivement un bon indice, la corrélation entre tenue à  l'air et bonification en cave est toutefois loin d'être directe. En effet, les réactions chimiques mises en oeuvre dans un long processus de vieillissement (réduction lente, apparition des arômes tertiaires) n'ont rien à voir avec le choc que subit le vin à l'ouverture de la bouteille (oxydation). Inutile donc de chercher à avoir une idée sur ce à quoi pourrait ressembler votre vin dans vingt ans en l'aérant pendant deux jours. Tout au plus serez-vous convaincu de son aptitude à la garde, sans préjuger de sa capacité à s'améliorer et à devenir plus complexe.

Déterminer le potentiel de garde d'un vin peut aussi s'établir par comparaison avec des vins aux caractéristiques proches (même terroir, même encépagement, même vin dans un millésime différent) que l'on a déjà goûté et que l'on a vu évoluer. Enfin, il est toujours recommandé de suivre l'évolution du vin au cours du temps afin de ne pas commettre l'erreur fatale de le boire trop tard. Chaque cave étant différente, le même vin pourra vieillir plus ou moins vite et vos pronostics d'apogée (ou ceux des professionnels) devront être régulièrement vérifiés. "Boire un vin trop tôt est rarement un désastre, le boire trop tard est une frustration irréparable".

Pas de grands vins sans grands terroirs

Le terroir désigne la terre, le sol et l'environnement climatique dans lequel vivent les vignes. Lorsque la culture est adaptée et respectueuse de cet environnement, le terroir apporte de la matière et un goût particulier au vin, signatures d'un lieu dit et de la richesse de son sol. Seuls le terroir et le travail du vigneron peuvent apporter la concentration, la consistance qui différencie le vin standard du vin de garde. La richesse contenue dans les raisins - notamment les tanins pour les vins rouges - est extraite lors de la cuvaison (macération pré-fermentaire, fermentation, macération post-fermentaire pour les vins rouges, fermentations et élevage des jus sur les lies pour les blancs). Ce travail de vinification est essentiel : sans concentration, faire vieillir un vin ne sert a rien ! La garde révélera immanquablement le manque de complexité et d'arômes d'un vin simple enrichi par les techniques modernes d'extraction (osmose inverse, macération de copeaux de chêne, ajouts de matières industrielles...)

Les vins de terroir sont des vins construits pour durer. Leur complexité ne s'exprime véritablement qu'après de longues années d'attente. Bien évidement, la plupart des grands vins de terroir sont issus d'appellations prestigieuses, référencées sur ce site, région par région.

Les phases de fermeture

Des bouteilles du 19eme siecle

Une phase de fermeture est une période pendant laquelle l'expression aromatique du vin est faible, voire nulle. Un vin fermé est un vin corsé, vigoureux et tannique dans lequel la structure prend le pas sur la matière et qui doit attendre encore quelques temps pour se révéler pleinement. C'est la période ingrate que connaît le vin entre les arômes fruités de sa jeunesse et les arômes tertiaires qu'il développe avec la garde. Attention donc avant de porter un jugement définitif sur un vin décevant : il pourrait très bien constituer une très agréable surprise plusieurs années plus tard.

Les vins de garde présentent souvent une phase de fermeture. Compte tenu de leur lente évolution, ils se caractérisent par des phases plus longues. Les vins blancs et rouges sont tous deux susceptibles de connaître une phase de fermeture. Empiriquement, on a constate que les Bourgognes rouges présentaient une phase plus longue que les Bordeaux rouges. En blanc, les vins de la vallée du Rhône (Hermitage, Chateauneuf), de Provence (Chateau Simone) ou de la Loire rentrent eux aussi souvent dans une phase de fermeture. Un carafage, parfois vigoureux, et quelques heures à température ambiante permettront souvent de gommer - au moins partiellement - l'austérité d'une phase de fermeture.

Il n'existe pas de règle pour définir le début et la durée d'une phase de fermeture. Son existence, incontestablement révélée par la dégustation, reste encore très partiellement expliquée d'un point de vue physico-chimique. De plus, il existe une multitude de facteurs agissant sur la durée de la phase de fermeture : maturité phénolique de la vendange, qualité des tanins, structure, acidité, terroir, cépage, style de vinification, etc... Il est important de noter que des vins peuvent présenter plusieurs phases de fermeture successives. Ce comportement sinusoïdal du vin souligne la difficulté d'ouvrir la bonne bouteille au bon moment. Les nombreux comptes rendus de dégustation d'amateurs ou de professionnels disponibles sur Internet peuvent être des sources pertinentes d'informations pour ne pas se tromper.

Les effets du temps

Vin tuilé

La garde se caractérise par une réaction chimique appelée "réduction". Cette réduction va entraîner l'apparition des multiples saveurs caractéristiques des vieux vins, mais aussi une évolution de la couleur du vin. Les vins rouges évoluent vers le tuilé. Les vins blancs prennent une teinte plus dorée avant de devenir ambrés jusqu'à l'ambre foncé, irrémédiable. Il est d'ailleurs assez remarquable d'observer qu'à long terme, les robes des vins rouges et blancs âgés peuvent se rejoindre. Les vieux vins sont caractérisés par les arômes tertiaires, dits aussi post-fermentaires. Les odeurs tertiaires les plus classiques sont celles de champignon, de sous-bois, de terre mouillée, de goudron et de cuir. La bouche révèle beaucoup de finesse et de rondeur, dans un style beaucoup moins puissant qu'un vin jeune.

Enfin, pour tordre le cou à une croyance populaire bien tenace, rappelons que le vieillissement d'un vin en bouteille n'est PAS dû à une entrée d'oxygène dans la bouteille par le bouchon. Cet effet est infime, voire nul. Les processus d'oxydation n'apparaissent donc que dans des cas très précis, notamment lorsque le bouchon laisse passer trop d'oxygène (cas des bouchons secs, en particulier lorsque les bouteilles sont conservées debout). L'oxydation se caractérise tout d'abord par des odeurs de miel, puis des arômes de plus en plus marqués de noix, d'anis ou de pruneaux. Un vin totalement oxydé, qu'il soit rouge ou blanc, a perdu la totalité de ses qualités gustatives. Il doit alors être considéré "perdu" et rien ne pourra plus l'améliorer.